24 juin 2012

Rire jaune

Je m’étonne depuis longtemps de la popularité de ceux que l’on qualifie d’humoristes. Nul besoin pour ces  « stand-up comic »  d’être très doués pour gagner en popularité ou en richesse. À défaut d’être drôles, ils amusent, ils m’amusent aussi. Le spectacle est rarement d’un bon calibre, il est souvent banal quand il ne sombre pas dans le très facile. S’il ne fait pas rire ou réfléchir, au mieux il distrait. Chacun peut s’exprimer ou dépenser son fric à sa guise. Je ne paierais pas pour entendre un « humoriste », mais je les regarde parfois à la télé. Heureusement pour eux, une même blague peut être dite de mille façons. Quelques-uns sont talentueux.
Le nombre de spectacles produits m’impressionne. Les gens sont-ils dépressifs au point de devoir payer pour qu'on leur tire quelques rires? Les spectacles d’humour ont toujours existé, je sais. Rien de plus naturel, mais, ils tiennent le haut du pavé, bébéficiant d'une certaine stature, sinon d'une forme de crédibilité aux humoristes. Voilà une autre chose qui m’agace. Ces séances de rires collectifs à prix élevés constituent-elles autant de thérapies collectives? Ne sait-on plus rire sans être désinhibés par un humoriste diplômé d’une école reconnue? Le rire et l’humour ne font-ils pas partie de notre nature que notre esprit devrait commander à volonté? Autrement, je me demande de quoi il s’agit.
Il y a humoriste et humoriste. Certains sont carrément drôles, d’autres passeront des messages ou feront dans la subtilité. Depuis quelque temps, par l'action heureuse des médias, il y a moyen de faire fortune sans avoir de grandes idées, sans création, sans originalité. Suffit d’apprendre des techniques de scène, de s’associer à de bons imprésarios et à de bons scribes (rarissime). Certains opteront pour le vulgaire (valeur sure) ou l’insulte (encore meilleur) sous prétexte que l’humour permet tout, que l’on n’a pas droit de leur prêter de mauvaises intentions malgré certains textes se voulant plus brun que brun. La réalité? C’est le cash ($) qui motive, comme c’est le cas pour nombre d’entre nous (rire) sauf que personne au travail ne me fait une ovation debout ou paie 80$ pour m’entendre parler pipi-caca.
J’ai noté ce mot de Georges Brassens : l’humour c’est la politesse du désespoir. J’ai parfois l’impression que nous sommes désespérés et à défaut d’un sauveur, nous adorerons le blagueur. Quoi qu’il raconte, aussi bas puisse-t-il descendre, nous le suivrons. J’appelle ça de l’humour morbide. Pas facile de se désintoxiquer de cette merde pour retrouver le rire sain. J’en arrive à l’évènement comique de la semaine.
Nos amis de la CLASSE (très drôles), ont botté le cul des humoristes. Ces derniers, préoccupés par leur capital de popularité, avaient organisé un spectacle « d’humour » au profit des carrés rouges (ne pas confondre avec les carrés aux framboises que j’adore). Les gens de la CLASSE considéraient cet argent sale, à cause des humoristes capitalistes sans vergogne. Les humoristes capitalistes sans vergogne et INDIGNÉS, ont alors décidé de ne pas leur remettre l’argent sale que refusait l’association des casseroles bruyantes.
Comment ne pas donner d’argent à des gens qui n’en veulent pas? Juste avec ça, y’a moyen d’écrire des sketchs. Je pense à réorienter ma carrière. À peu près tous les médias ont ridiculisé la CLASSE qui refusait l'argent sous prétexte que trop d’humoristes produisent des spectacles sexistes, racistes et discriminatoires, dont le simple but est de faire du fric (oubliez les second et troisième niveaux). Dans mon esprit, les gens de la CLASSE ont gagné des points, mais nous sommes tellement peu habitués à un brin d’authenticité que la seule chose que nos médias ont pu faire, c’était de se moquer de la décision de la CLASSE. Aucun média n’a parlé du pipi-caca, du « sale » fric, de ce que rapportent ($) les excréments oraux, des subventions gouvernementales au pipi-caca, et des nombreuses et véritables causes que nos humoristes auraient pu adopter.
Les très intelligents lecteurs que vous êtes ferez la distinction entre certains humoristes et d’autres. Évidemment, tout le monde a droit de parole, mais personne ne vous oblige à trouver drôle ce qui ne l’est pas. Aujourd’hui c’est la fête nationale, le mouton est en vedette, néanmoins, rien ne nous oblige à suivre quiconque.
Grand-Langue

2 juin 2012

Vomissure

Sur le merveilleux monde du WEB, pendant une dizaine de jours on a pu voir un homme en tuer un autre, perpétrer un acte de nécrophilie puis démembrer la pauvre victime. Je m’abstiens des détails. Même si je n’ai pas vu le film, j’ai des images dans la tête. J'apprends que la vidéo n'est plus en ligne depuis quelques heures. Puisque l’affaire a fait le tour du Monde, de nombreux curieux furent tentés par l’expérience que constitue un tel visionnement. C'est déprimant.

Dans cette histoire, on croirait que la victime joue un rôle, un second rôle. C'est comme si chaque membre du corps était plus important que le tout. Le sang écœure, l’acte sexuel répugne, le découpage en amuse certains mais de façon générale, j’ose croire que ça dégoute. Je ne veux pas savoir combien de gens sont allés visiter le site en question, par respect pour la victime, n’oublions pas  que l’ensemble des membres répartis un peu partout, constituait, il n’y a pas longtemps, un être humain, avec une tête, une vie, des sentiments. Le second rôle était joué par quelqu’un d’aussi vrai que vous et moi.

Et les parents de la victime, comment ont-ils pu réagir à l’annonce de la nouvelle? Peut-être ont-ils appris "le fait divers" pour ensuite réaliser que la pièce découpée était leur enfant.

Silence.

Peut-être recevront-ils un colis dans les prochains jours. J’espère que non. Patrick Sénécal n’aurait pas inventé meilleur scénario. Et le film est probabllement encore disponible quelque part sur le WEB, gratuitement.

Ne tenez aucun propos diffamatoire sur le WEB vous pourriez être poursuivi. Cependant vous pouvez offrir ce film. Allez taper sur vos casseroles car il y a là matière à s’indigner, je décrète cela unilatéralement. Et si le second rôle avait été tenu par un personnage important, la chose se déroulerait-elle de la même façon? Le film aurait-il tenu l'affiche aussi longtemps? Le fait qu’il s’agisse de gais, est-ce que ça rend plus acceptable cette vidéo gratuite? Les parents du Chinois dépecé iront-ils visionner le film? La Chine c’est populeux, est-ce que le site gore en question a fait beaucoup de fric grâce à ce court métrage? Chose certaine, ce fut une fameuse publicité pour eux.

Mes questions peuvent sembler étranges et cruelles mais puisque ce film fut offert à tous, en toute légalité, je peux écrire ce que je veux. Mon sujet, c’est la victime, sa condition et son exploitation. La victime est d’abord celle de son assassin mais elle est aussi celle d’un drôle de principe voulant que l’on puisse TOUT montrer sans que le simple sens commun ne parvienne à limiter cette « ridicule liberté ». Dans un sens, nous sommes tous victimes de cette fausse liberté. Il existe de grands principes qui deviennent ridicules en certaines circonstances. Quelqu’un m’a dit : « on n’est pas obligé d’aller voir la vidéo ». Évidemment! J’ai presque répondu : et tes ados, ont-ils vu la vidéo? Et la famille de la victime, en sachant que tout le monde pouvait voir ce foutu film et qu'il circule en catimini, que ressent-elle?

Mon billet n’est pas une sortie contre le WEB ou contre la liberté d’expression ou contre le droit de gérer un site en conformité avec la loi. La liberté a un prix, bien vrai mais quoi qu'il en soit, ce billet est d'abord une façon de vomir ce que je ressens.

Grand Langue